Wednesday, August 20, 2008

Traction-brabant 12

Saviez-vous, non mais, saviez-vous, qu’il y a beaucoup de personnes qui n’écrivent même pas, même pas de poésie ?
C’est scandaleux, je vous l’accorde, d’autant plus qu’on se demande comment ces gens là peuvent trouver la vie drôle, alors que nous, les poètes, nous sommes tous de joyeux drilles, optimistes devant l’existence et remplis d’une ardeur conquérante, c’est bien inconnu.
Imaginez plutôt qu’il y a des êtres qui passent le plus clair de leur temps à customiser leur Renault 14, qui buttent des patates à la pleine lune, y en a d’autres qui disposent des araignées de merde au fond d’un aquarium pour que leurs ides s’y grattent. Pis y en a d’autres qui dealent des photos de cul, pis y en a qui courent dans la boue le matin du 11 janvier, y en a qui collectionnent des cartes postales de leur rue qu’ils encadrent de pq, y en a qui jouent aux haltères au pied de leur caméra, d’autres qui se mettent du rouge à lèvres sur les babines et se baladent la nuit en porte-jarretelles, hommes et femmes confondus, y en a qui font du rap à la macu, y en a qui préparent des cocktails détonants à la mort subite et au rutabaga, aux pointes de quarante cinq et à la colle, y en a des qui peignent et qui peignent au Ripolin, des qui chantent et qui chantent du Claude Françoise, des qui fabriquent des brouettes en allumettes bleues, qui inventent des drôles de jeux de rôle en armures avec des heaumes de calendres de Traction-avant.
Mais les pires sont ceux qui ne font rien de tout ça, ceux qui sont atteints d’une sale folie sèche, ceux qui travaillent tout le temps, par manie, habitude ou nécessité.
Ceux-là sont très dangereux ou (et) très malheureux.
Ceux-là, on n’arrive jamais à les éviter, comme les ballons perdus au bord des stades ou à la télé. Ils ont les yeux injectés de sang mais ils ne nous font pas peur car nous marchons à l’ombre depuis trop longtemps, nous les poètes à la barbe fleurie et à la comptine bouchée.
On les aura, on les aura tous !


P.M.

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